La pénurie de main d'œuvre en Chine n'a jamais été aussi criante en Chine en ce début 2010. Après le licenciement l'année dernière de millions d'ouvriers suite à la crise des subprimes, la tendance s'est complètement renversée.
Pour faire face à cette situation de crise, les usines sont obligées d'augmenter les salaires. Dans les boites d'intérim, le coût par heure d'un ouvrier est passé de 0.95 usd par heure à 1.17 usd après le nouvel an chinois.
A Dongguan, on a besoin de plus de 150 000 ouvriers supplémentaires après la Fête du Printemps, d'après Huang Huiping, un responsable du Bureau du travail et de la sécurité sociale de Dongguan. Des sources provenant de ce bureau ont annoncé qu'en décembre, il y avait, dans la ville, deux postes pour une personne.
A Zhongshan, centre de fabrication d'appareils électroménagers, il manque 130 000 ouvriers après les fêtes, d'après Zhang Yousheng, directeur général adjoint de Gaowei Electrics Group. « Cette année, les salaires augmenteront de 30%. Pourtant, nous avons toujours autant de mal à trouver des ouvriers qualifiés », dit-il. « Nous avons beson d'ouvriers sur nos chaînes de fabrication, car nos commandes ont augmenté », a-t-il ajouté.
Une récente enquête menée par le journal Southern Metropolis Daily de Guangzhou a ainsi montré que plus de 20% des travailleurs migrants de Dongguan ne reviendraient pas après la Fête du Printemps, du fait de salaires relativement bas. Le salaire minimum des ouvriers à Dongguan est fixé à 1 000 yuans par mois. La moyenne devrait se situer entre 1 500 et 2 000 yuans par mois.
Lors d'un salon de l'emploi à Shenzhen le 21 février 2010, seules 1 000 personnes sont venues chercher du travail. On essaie aussi la cooptation : 200 yuans à chaque ouvrier qui présenterait un candidat à l'embauche.
Explication à cette pénurie si brusque :
- une économie qui s'améliore après une 2009 difficile, ce qui augmente les besoins des marchés dérivés et accroît tout naturellement la demande en main-d'œuvre (la plupart des commandes concerne les entreprises à fort taux de main d'oeuvre)
- des salaires trop bas : les usines hésitent encore à faire répercuter la hausse des salaires (tôt ou tard inévitable) sur leurs clients, principalement américains et européens mais ça se saurait tardé. La faiblesse des salaires n'incite pas les ouvriers à continuer leur vie de labeur
- deux mouvements de fonds qui arrivent à maturité actuellement : la politique de l'enfant unique par famille introduite en 1977 et le développement de l'enseignement secondaire (2 millions d'étudiants en 2000, 6.4 millions cette année). Ces deux phénomènes contribuent à faire baisser le taux de main d'oeuvre immédiatement disponible
- la nouvelle politique d'aménagement du territoire en Chine pour le développement des régions intérieures au pays (construction d'autoroutes par exemples). Du coup, les ouvriers trouvent plus facilement qu'auparavant du travail même dans leurs provinces reculées et y restent, préférant cette qualité de vie au travail de forçat dans les fabriques de la cote est de la Chine
- un changement structurel qui s'est produit au sein de la main-d'œuvre rurale. Les jeunes de la génération post-80 et de la génération post-90 sont devenus la force principale des demandeurs d'emplois mais elles ont des exigences et des aspirations différentes de leurs prédécesseurs et un grand nombre d'entre eux ne désirent pas être un simple ouvrier de production.